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Vue de la scénographie Comment résister à un peu
structurée avec des de fétichisme avec les Daft
échafaudages Layher. Au Punk ?
premier plan le Walking
Cube de 1024 (2015), une Ci-contre :
structure erratique animée L’installation Core de 1024
par des vérins pneumatiques. (2019). Avec ses 81 tubes
En arrière-plan, le « studio LED, Core transforme la
imaginaire » de Jean-Michel bande-son de Laurent
Jarre. Garnier en formes et en
couleurs.
© Gil Lefauconnier
Core au corps
ultra chic de la mode. Un point de vue décennies. Familiers des scénographies de
Par Emmanuel Caille qui nous aurait appris beaucoup sur notre concert depuis le Square Cube qu’ils avaient
société mais peu sur la musique. Même si conçu pour Étienne de Crécy en 2007, Pier
Le musée de la musique à la Philharmonie elle cède parfois au fétichisme avec le stu- Schneider et François Wunschel de 1024
de Paris présente jusqu’au 11 octobre une dio reconstitué de Jean-Michel Jarre ou les architecture sont les parfaits metteurs en
exposition consacrée à la musique élec- casques de Daft Punk, l’exposition s’attarde scène de cette expérience proposée aux visi-
tronique. de düsseldorf à detroit en pas- donc peu sur ce déterminisme sociolo- teurs. La trame des échafaudages standards
sant par Paris, de Kraftwerk à daft Punk, gique et préfère nous plonger sans retenu de chantier qu’ils utilisent souvent pour
les architectes de 1024 ont scénographié dans l’esthétique de la culture techno : les leurs installations (2,07 m) correspondait
cette aventure en tentant de nous offrir images, outrageusement clinquantes ou par hasard à la moitié de celle du bâtiment
une expérience immersive. minimalistes avec arrogance, coexistent de Jean Nouvel (4,14 m). Cette homothétie
par la force du rythme et des sons. Jean- permet de structurer les espaces d’expo-
La musique et l’architecture ont en com- Yves Leloup a convoqué les œuvres des sition avec une grande fluidité. Mais les
mun la difficulté que l’on rencontre à les plasticiens qui ont depuis toujours été fas- architectes ont également conçu spéciale-
montrer dans un musée ou une exposition. cinés par cet univers : les photos de rave ment pour l’exposition une installation
Que nous disent en effet de leurs œuvres party d’Andreas Gursky, les recycled records immersive établissant une relation concrète
la paire de lunettes de John Lennon, la tu- de Christian Marclay et les sculptures de entre espace et musique : Core est un cube
nique de Jimi Hendrix ou la guitare de Syd Xavier Veilhan ou, dès l’entrée, La Fête de 3 m de côté dans lequel 81 barres LED
Barrett ? Pour évoquer la musique électro- est finie, phrase écrite au néon de Claude inclinées de 24 ° réagissent en mouvement
nique de « Kraftwerk à Daft Punk », Jean- Lévêque qui nous accueille non sans pro- et en couleurs à la bande-son de Laurent
Yves Leloup, commissaire de l’exposition, vocation. La bande-son, qui porte les visi- Garnier. Placé au cœur du parcours, Core
n’a pas eu la fausse bonne idée de la trai- teurs à un rythme minimal de 120 BPM, offre par son effet hypnotique une expé-
ter en anthropologue de cette culture qui est constituée de 11 mix de 30 minutes rience qui fait ressentir rétroactivement au
a longtemps été reléguée dans les marges : mijotés par Laurent Garnier comme plus près, physiquement, ce que le reste de
trop élémentaire, trop futile, trop hédo- une anthologie de ces quatre dernières l’exposition nous invite à revivre.
niste, elle fascine pourtant, oscillant depuis
ses origines entre les bas-fonds de Chicago,
les lieux LGBT et les podiums du monde
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